La désillusion
[Sonnet en 3 temps]
C’est lui, c’est l’homme blessé
L’homme désillusionné
Une plaie dans son cœur bée
Une déchirure imperceptible
Sous son sein erre, muette, indélébile
Telle l’armure d’un choix indéfectible
Heurté par une femme d’antan
Figé dans son sang
Il s’est résolu l’espace d’un instant
À faire abandon de ses sentiments
Et doucement il s’enferre
Son cœur de pierre en bandoulière
Solidement ficelé de lierre
Perché sur un plafond de verre
–
Il n’a plus l’espoir
Que de jolis soirs sur des trottoirs
Égaré, il se perd dans de minces exutoires
Il parade alors de vies en lits
Se sustentant de petites morts la nuit
De boucles parsemées sur les oreillers
Et, délaissant ses belles endormies
Il s’en retourne non épris
Dans les gris matins de pluie
Vers ses continents fades et assagis
Drapé dans le manteau de sa solitude
Faussement heureux d’uniques préludes
D’infinies et terribles habitudes
Et de songes d’amour en désuétude
–
En lui il murmure et se jure
Que jamais plus aucune torture
Ne viendra écorcher ses meurtrissures
Puis que son cœur s’est tu
Et que sa souffrance ainsi mise à nu
N’offrira jamais que des amours déchues
Dans les clameurs de son for intérieur
Naissent parfois de fragiles lueurs
Tristement invisibles à l’empereur
Noyé dans son pâle jeu sans ferveur(s)
Il n’aime ni se laisse aimer,
Lui, l’homme blessé
L’homme désillusionné
Une plaie dans son cœur bée.
Crédits photo : Hervé Thomas-Miton